Les techniques antiques : Le Nielle.

C’est une technique produisant un décor en incrustant une matière de couleur noire ou bleutée, le nielle, dans des traits gravés dans un métal clair (argent ou or le plus fréquemment). Le nielle peut aussi être appliqué sur des surfaces lisses.

Dague en bronze, or, argent et nielle, découverte dans la tombe A de Mycène, 1600-1100 av. J.-C., Musée archéologique d'Athènes. Photo by Stephen Zucker.

Dague en bronze, or, argent et nielle, découverte dans la tombe A de Mycène, 1600-1100 av. J.-C., Musée archéologique d’Athènes. Photo by Stephen Zucker.

Le nielle est composé de sulfures métalliques dont la composition varie selon les époques, et détermine son mode d’application.
Les grains de nielle peuvent être plus ou moins fins.

Il faut déposer le nielle dans les sillons de l’objet de façon uniforme pour éviter que des défauts apparaissent sur l’objet. La surface de l’objet est ensuite lissée et enduite de borax, puis séchée et chauffée jusqu’à la fusion aux environs de 400 °C.
La première recette connue est donnée par Pline l’Ancien, au Ier s de notre ère,  dans son Histoire Naturelle : « On mélange à l’argent un tiers de cuivre de Chypre en copeaux très fins, et autant de soufre vif que d’argent; on fait fondre le tout dans un récipient de terre luté avec de l’argile; la cuisson doit continuer jusqu’à ce que le couvercle s’ouvre de lui-même. »

On peut lire également dans le « Papyrus de Leyde » datant du IIIe s de notre ère, rédigé en grec, la recette d’une substance noire qui semble être celle du nielle et qui contient du cuivre, de l’étain, du plomb et du soufre.
Au III e s, la « Mappae Clavicula » fournit 6 recettes pour fabriquer le nielle, qui sont toutes à base de sulfures. Trois d’entre elles concernent un nielle à appliquer sur une surface, et les trois autres un nielle à incruster.

Dague en bronze, or et nielle, découverte dans la tombe A de Mycène, 1600-1100 av. J.-C., Musée archéologique d'Athènes. Photo by Stephen Zucker.

Dague en bronze, or et nielle, découverte dans la tombe A de Mycène, 1600-1100 av. J.-C., Musée archéologique d’Athènes. Photo by Stephen Zucker.

Nous pouvons voir grâce à une étude géologique sur le site minier d’Alburnus Maior en Roumanie (actuellement Rosia Montanà) que cette technique existait effectivement à l’Antiquité. Grâce à l’archéologie minière, les chercheurs ont prouvé la présence de différents minerais qui étaient utilisés à l’époque romaine, notamment des restes d’électrum, de minéraux d’argent et de différents sulfures.

N.K.

Les techniques antiques : La Damasquinure ou Damasquinage.

Ces deux termes sont des appellations apparaissant au XVII e siècle. Auparavant cette technique s’appelait « barbaricarius« .

C’est une technique produisant des effets décoratifs par contrastes de couleurs des différents métaux choisis. Ces effets sont obtenus en incrustant par martelage des fils, des petites plaques ou des feuilles de métal, dans un fond de métal différent, sur lequel des sillons et des surfaces ont été gravé au préalable.

Le métal servant de fond peut être du fer, de l’acier, du cuivre et plus rarement de l’or ou de l’argent.
De l’autre côté les incrustations sont le plus souvent en argent ou en or, en cuivre ou en laiton.

L’un des premiers exemples connus de cette technique est une hache cérémonielle du roi Amosis d’Egypte (Nouvel Empire, XVIIIe dynastie), datant du IIe millénaire av.JC., en cuivre, or et électrum, se trouvant au Musée égyptien du Caire, n°inv JE 4673.

Hache cérémonielle du roi Ahmosis©insecula.com

Hache cérémonielle du roi Ahmosis©insecula.com

Dans les fouilles du site de Touva en Sibérie (dont nous parlons dans l’article « gravure antique »), on trouve également un exemple nous montrant l’utilisation de cette technique dès le VII e s av. J.-C.. Sur des armes en fer de la tombe Arjan 2, on peut voir des incrustations d’or et de fer.

N.K.

Les techniques antiques : Le cloisonné.

Le cloisonné est une technique formant un décor composé de « cloisons » à partir de rubans métalliques  fixés sur un fond du même métal.

L’ orfèvrerie cloisonnée s’applique aussi pour les décors de pierres ou d’émaux montées dans des cloisons de métal formant des bâtes.

Pendentif, rapace tête de bélier, Nouvel Empire (v. 1550-1069 av. J.-C.©Musée du Louvre/C. Décamps

Pendentif, rapace tête de bélier, Nouvel Empire (v. 1550-1069 av. J.-C.©Musée du Louvre/C. Décamps

Des ouvrages en cloisonné sont connus en Egypte dès le début du IIe millénaire av. JC. Les cloisons proviennent soit de l’inclusion de bandes métalliques dans de la pâte de verre amollie soit en découpant et en assemblant entre elles par soudure de fines bandes de métal. Les

Bague aux chevaux, Nouvel Empire (1550-1069 av. J.-C.)©Musée du Louvre/C.Décamps

Bague aux chevaux, Nouvel Empire (1550-1069 av. J.-C.)©Musée du Louvre/C.Décamps

alvéoles ainsi déterminées enserrent des pierres fines ou des pâtes de verre découpées aux dimensions adéquates et maintenues par une sorte de ciment tapissant le fond des alvéoles.
On observe surtout l’application de cette technique en corrélation avec celle de l’émaillage. L’émaillage se fait après avoir préalablement fait un cloisonnage. On introduit dans chaque alvélole cloisonnée une poudre d’émaux. Puis on chauffe l’objet dans un four ou un foyer de cuisson pour faire adhérer l’émail à la cloison de métal. Lorsque l’objet est terminé, on observe les cloisons métalliques que sous la forme d’étroites bandes de métal.

 

L’émail cloisonné est apparu en Orient durant l’Antiquité mais est utilisé très rarement ce qui fait que l’on ne peut déterminer précisément les différentes étapes techniques avant le Moyen-Âge.

 

Les orfèvres appliquaient probablement l’émail en mouillant l’objet dans une pâte liquide afin de remplir les motifs cloisonnés. On peut retrouver la pratique de l’émail dans l’art grec, scythe, étrusque mais surtout en Russie dans les régions caucasiennes.

Coche de la Ferté dans son ouvrage Les bijoux antiques, écrit en 1956, pense que la cloisonné est issu de la technique du filigrané et qu’il serait apparu à partir d’un procédé alexandrin qui consistait en la découpe d’une forme métallique dans une pièce de verre en fusion. Les romains seraient à l’origine de l’apparition de cette technique en Occident du fait des nombreux échanges avec l’Orient.

N.K.

Les techniques antiques : La Ciselure.

La ciselure est un décor fait de traits et de surfaces enfoncées.

Ciselure et gravure. ©http://www.teheran.ir

Ciselure et gravure. ©http://www.teheran.ir

Elle est pratiquée sur l’endroit d’un métal qui peut être sous la forme d’une feuille ou en masse. C’est une technique sans enlèvement de matière contrairement à la gravure. Dans le cas où le métal est en feuille, les motifs ciselés sont visibles en négatif sur l’envers.

C’est un travail effectué à froid sur le métal (c’est-à-dire que celui n’est pas chauffé pour le rendre plus ductile) par petits coups successifs afin que le métal évite de se fendre. Pour amortir le tracé des traits et les reliefs donnés au métal, l’orfèvre utilise un support mou qu’il enlève après avoir fini son décor.

Même si aucune indication spécifique sur l’outillage de l’orfèvre à cette époque n’a été trouvé, il devait très certainement utiliser un objet coupant qui pourrait correspondre aux ciselets utilisés actuellement par les orfèvres, et un objet lourd, comme une simple pierre, qui lui servait de « marteau » pour taper sur l’objet coupant et ainsi créer un motif.

Pline l’Ancien, dans son Histoire Naturelle, tome II, livre XXXIII, parle de grands orfèvres ayant utilisés la technique de la ciselure non pas sur des objets en or mais plutôt en argent :

« Chose singulière, la ciselure de l’or n’a illustré personne ; celle de l’argent a illustré beaucoup d’artistes. Toutefois le plus célèbre ciseleur d’argent est Mentor ; on ne cite de lui que quatre couples de vases, et l’on dit qu’il n’existe plus aujourd’hui un seul de ces morceaux : tous ont péri dans l’incendie du temple de Diane à Éphèse ou dans celui du Capitole. Varron a écrit qu’il possédait une statue d’airain de la main de cet artiste. Les plus admirés après lui sont Acragas, Bœthus et Mys. On voit aujourd’hui des morceaux de tous ces artistes dans file de Rhodes : de

Ciselure et gravure ©http://www.teheran.ir

Ciselure et gravure ©http://www.teheran.ir

Bœthus, dans le temple de Minerve à Lindos ; d’Acragas, dans le temple de Bacchus à Rhodes même, des coupes représentant en ciselure des bacchantes et des centaures ».

 

On peut donc trouver ici une attestation de l’utilisation de cette technique dès l’Antiquité.

AS.L.